En période de conflit ou d’autoritarisme, les femmes deviennent souvent la cible de violations des droits humains en raison de leur sexe et de la marginalisation dont elles sont victimes dans de nombreuses sociétés. Elles peuvent être soumises à des violences physiques et sexuelles, ainsi qu’à d’autres violations qui les affectent de manière particulière, comme la disparition forcée de leurs proches, le déplacement et la discrimination socio-économique.
Par exemple, les femmes dont le mari a disparu de force lors d’un conflit peuvent subir un traumatisme psychologique prolongé, des obstacles juridiques injustes et d’autres formes de discrimination en raison de leur statut ambigu de femme ni mariée ni officiellement veuve. Elles courent un plus grand risque d’exploitation en raison de la pauvreté aggravée par la perte du principal soutien de famille et de l’ostracisme de leur famille et d’autres réseaux sociaux proches.
Aggravant ces préjudices, la capacité des femmes à obtenir un recours est souvent très limitée, en raison des inégalités structurelles. Les mécanismes de justice transitionnelle eux-mêmes peuvent être aveugles aux besoins particuliers des femmes s’ils sont mal conçus, et les réponses peuvent refléter les déséquilibres de pouvoir entre les sexes dans la société en général.
Si les femmes sont souvent parmi les plus marginalisées de la société, ce qui nécessite une attention spécifique et des réponses ciblées en matière de justice transitionnelle, la justice de genre ne concerne pas uniquement les femmes. Toutes les expériences des victimes doivent être évaluées en fonction de leurs implications sexospécifiques. Une approche de la justice transitionnelle sensible au genre examine et traite l’ensemble des expériences, y compris celles des victimes masculines dans des contextes particuliers ainsi que celles des victimes LGBTQI.
La justice transitionnelle peut-elle contribuer à promouvoir la justice pour les victimes de violences sexuelles et sexistes ?
Les réponses de la justice transitionnelle aux violations sexospécifiques commises pendant des conflits ou sous des régimes autoritaires sont essentielles pour garantir la justice aux victimes, lutter contre la marginalisation des femmes et prévenir de futures violations à l’encontre des femmes et d’autres groupes ciblés en raison de leur sexe. Il est tout aussi important de veiller à ce que les mesures de justice transitionnelle abordent de manière significative les causes et les conséquences de tous les abus contre les femmes, même ceux qui ne sont pas intrinsèquement fondés sur le genre.
Au cours des dernières décennies, des progrès considérables ont été réalisés en termes de reconnaissance publique de l’inégalité entre les sexes, de la discrimination et des violations des droits humains fondées sur le genre. Trop souvent, cependant, ces reconnaissances ne se traduisent pas par une mise en œuvre effective. Cet échec est dû en grande partie à un manque de connaissances techniques sur la manière d’appliquer des mesures qui encouragent la participation des femmes et traitent de manière adéquate la nature sexospécifique des violations des droits humains.
Cette lacune est aggravée lorsque les femmes sont également exclues du processus décisionnel. Les femmes doivent jouer un rôle central dans la conception et l’application des mesures de justice transitionnelle si l’on veut répondre correctement à leurs besoins. C’est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre une politique dans un contexte de violence sexuelle et sexiste permanente, où la volonté et la capacité des autorités à enquêter font défaut.