Gambie

Après la défaite électorale et l’exil de l’ancien dictateur Yahya Jammeh en 2017, la Gambie s’est engagée dans un processus de justice transitionnelle pour reconstruire un État démocratique où prévalent les droits de l’homme, les libertés individuelles et l’État de droit. La mission de l’ICTJ dans le pays est de soutenir la mise en œuvre d’un processus de justice transitionnelle inclusif et centré sur les victimes, dont tous les Gambiens se sentent possesseurs.

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 Image d'un atelier sur l'engagement des jeunes en Gambie.

L’ICTJ dirige un atelier sur l’engagement des jeunes en Gambie.

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Contexte : Tenir la promesse du « plus jamais ça » 

Après s’être emparé du pouvoir par un coup d’État en 1994, Yahya Jammeh a imposé un régime autoritaire à la Gambie pendant 22 ans. Le régime a commis de nombreuses violations graves des droits de l’homme, telles que des exécutions sommaires, des meurtres, des disparitions forcées, des violences sexuelles, des détentions arbitraires et des actes de torture. Défait lors des élections présidentielles de 2016, Yahya Jammeh a contesté un moment les résultats du scrutin, avant d’être contraint de s’exiler en Guinée équatoriale. 

Le gouvernement nouvellement élu a rapidement lancé un processus national de justice transitionnelle. Il a créé plusieurs organes et institutions, dont un mécanisme de réforme du secteur de la sécurité, une commission d’enquête sur les transactions financières de l’ancien dictateur (qui a fonctionné de juillet 2017 à avril 2019), la Commission de révision de la Constitution (qui a opéré de juin 2018 à mars 2020) et la Commission vérité, réconciliation et réparations (CVRR, lancée en septembre 2018). Le mandat de la CVRR a été prolongé à deux reprises pour donner à la commission le temps de compléter et de soumettre son rapport final et ses recommandations au président du pays. 

Lors des consultations publiques organisées par le gouvernement, les victimes et les organisations de la société civile ont exprimé leur désir de justice, de respect des droits de l’homme et de mesures visant à empêcher la répétition des violences et de la répression. Le peuple gambien a largement soutenu la CVRR, ce qui témoigne d’un large intérêt et d’une grande confiance du public dans le processus. Outre les objectifs qui lui sont assignés, le processus s’est avéré être une occasion cruciale d’engager tous les citoyens – notamment les plus vulnérables – dans l’instauration d’une société plus juste où les droits de chacun sont respectés. Cela dit, un certain nombre de problèmes importants, comme la difficulté à assurer la sécurité des femmes participantes, ont mis le processus à l’épreuve depuis sa création.

Le rôle de l’ICTJ 

Depuis 2018, l’ICTJ travaille avec divers intervenants à traiter les séquelles de l’autoritarisme et des violations des droits de l’homme en Gambie.  

L’ICTJ soutient le gouvernement dans son engagement en faveur d’un processus de justice transitionnelle crédible et inclusif, en fournissant à la CVRR et à d’autres institutions et acteurs étatiques concernés des conseils stratégiques, une assistance technique continue et d’autres formes de soutien. Nous avons offert une formation professionnelle aux commissaires de la CVRR et à des membres du personnel. 

L’ICTJ a ouvert des espaces sécurisés pour les groupes marginalisés, en particulier les femmes et les jeunes, afin qu’ils puissent formuler leurs demandes et participer au processus. Nous nous efforçons d’inclure tous les Gambiens dans le processus de justice transitionnelle et d’améliorer leur capacité à l’influencer et à faire valoir leurs droits. 

L’ICTJ travaille côte à côte avec les victimes, les groupes de femmes et les organisations de la société civile pour s’assurer que les femmes ne soient pas exclues et participent à la recherche de la vérité. Nous avons soutenu la création de l’Unité des affaires féminines au sein de la CVRR. Nous avons aidé les femmes victimes des zones rurales à élaborer un rapport sur leur vécu pendant la dictature, qu’elles ont officiellement et publiquement présenté à la CVRR en décembre 2019, afin d’inciter les commissaires à prendre en compte toute la gamme des violences sexuelles et sexistes mentionnées dans le rapport. 

L’ICTJ travaille avec des groupes de jeunes et d’autres organisations de la société civile pour s’assurer que leurs voix sont entendues, que leurs préoccupations sont prises en compte et qu’ils sont inclus dans le processus de justice transitionnelle. Nous appliquons des programmes de sensibilisation novateurs pour faire participer les jeunes et les personnes vivant dans des régions reculées.  

Nous avons participé à l’organisation du collectif de jeunes artistes Our Nation Our Voice, qui a parcouru le pays en caravane pendant 11 jours, s’arrêtant dans 11 villages et trois villes pour organiser des dialogues communautaires et donner des concerts pour les Gambiens parmi les plus marginalisés. Les vidéoclips des artistes et un documentaire sur la tournée de la caravane ont été présentés en avant- première lors d’un concert gratuit en octobre 2019, auquel ont assisté plus de 1 000 jeunes du grand Banjul. Our Nation Our Voice a permis de sensibiliser les jeunes Gambiens à l’importance du processus de justice transitionnelle dans le pays et de leur participation active à ce processus.